Edito

Le CAPAS réunit aujourd’hui 45 organisations avec la volonté de renforcer la capacité d’agir en commun afin de défendre et de promouvoir l’action associative en tant que gage de créativité et de recherches alternatives.

Nous cherchons à valoriser l’expertise de nos organisations et leur connaissance du terrain en lien avec l’action sociale, nous favorisons les échanges entre les membres, et plus largement avec les institutions publiques et privées, et nous développons la coopération entre nos membres, luttant contre des fonctionnements en silo et favorisant ainsi l’émergence de projets collectifs.

Dans le cadre de la crise Covid-19 et du premier semi-confinement, nombre d’organisations membres du CAPAS ont mesuré l’ampleur de la crise annoncée et pris des dispositions afin de faire face à des défis inouïs en matière de précarité. L’urgence a dicté la cadence des réponses à trouver, que ce soit en termes de distribution d’aide alimentaire, d’hébergement ou de soutien psychologique et financier.

Perte de revenu ou d’emploi, chômage partiel, insécurité et fragilité financière et alimentaire, sont les marqueurs d’une précarité à la fois relevée et exacerbée par la crise sanitaire. Nombre d’organisations ont, avec leurs collaborateur-trice-s et leurs bénévoles engagé-e-s à leurs côtés, fait preuve d’agilité et de réactivité. Elles se sont mobilisées sans relâche pour participer au maintien de la cohésion sociale, dispensant une aide adaptée à toutes les personnes qui en ont eu besoin. Il s’est agi de mettre en œuvre une intelligence collective et un engagement créatif et solidaire au service de la communauté genevoise. Souvenons-nous ici qu’une société sans solidarité est une société qui se meurt. Cette situation extraordinaire a exigé des associations qu’elles réorganisent leurs prestations et leurs permanences pour assurer à un nombre accru de personnes un accompagnement psychosocial et juridique plus nécessaire que jamais. La créativité et l’agilité de nos organisations s’est traduite sur le terrain par le déploiement de réponses variées et adaptées : hotline et entretiens mis en place par différents moyens informatiques afin d’assurer un suivi renforcé des personnes restées confinées, maintien d’un lien avec des personnes vivant de fortes angoisses, de la violence domestique, ou des situations de grande précarité, etc.

La distribution d’aides financières d’urgence a été rendue possible par une forte mobilisation des professionnel-le-s sur le terrain. Avec le soutien de partenaires privés, nombre d’organisations ont pu créer des fonds d’urgence ou de solidarité pour des aides leur permettant de répondre aux sollicitations pour payer un loyer, manger, se soigner. A partir de la mi-mars et jusqu’à fin juin 2020, sur un échantillon de 12 organisations membres, il s’avère que plusieurs millions de francs d’aide privée ont été distribués à plus de 4’000 personnes dans le contexte que nous connaissons. Par la mise en place de structures pour la distribution alimentaire, certaines d’entre nous ont œuvré également à la création d’une task force assurant la distribution de bons alimentaires dans plusieurs quartiers de la ville de Genève, puis à la patinoire des Vernets, en collaboration avec la Caravane de solidarité, Partage et les Colis du Coeur. La confection de repas à l’emporter a aussi été assurée, en même temps que l’ouverture d’espaces au sein des associations pour distribuer des produits de première nécessité. Jusqu’à fin avril 2020, un collectif d’associations a par ailleurs œuvré pour assurer un accueil inconditionnel aux personnes sans-abris. D’autres organisations ont développé des services directs à la personne adaptés aux circonstances. Sur le terrain, nous avons dû identifier et évaluer les situations de personnes éligibles à une aide financière et sociale. Pour cela, il a fallu développer de nouvelles prestations telles que le «Pôle personne» de la Croix-Rouge genevoise et renforcer les équipes afin d’assurer le soutien attendu.

Concernant le secteur sanitaire, le développement de nouvelles prestations a été nécessaire pour faciliter l’accès aux traitements de substitution et assurer une collaboration rapprochée avec les services hospitaliers, développer des actions mobiles dans différents quartiers de la Ville, créer de nouveaux espaces d’accueil et des espaces de distribution de matériel sanitaire. Passé le temps de la sidération devant les files d’attente à la patinoire des Vernets, l’aide apportée aux plus précaires s’est réorganisée avec le soutien des autorités de ce canton. La leçon est claire: nous devons agir collectivement, en partenaires, entre autorités publiques et organisations privées.

Aujourd’hui, nos organisations sont confrontées à quelques enjeux et défis majeurs dans un contexte qui ne cesse de changer, avec en toile de fond une triple crise: sanitaire, sociale et économique. Les effets de la crise Covid n’ont en effet pas fini de se faire sentir au sein des populations qui vivaient déjà une situation de précarité. Cependant, le risque de la banalisation et de l’oubli nous guette.

Le CAPAS, plus que jamais, est un acteur incontournable, qui participe de manière active à l’évolution des politiques et de l’action sociales du Canton. Nos expertises sur de multiples thématiques font de nous un pôle de ressources que les collectivités publiques doivent mieux solliciter. Nous pouvons, à travers des projets innovants, mutualiser nos ressources au service de toutes et tous, pour devenir plus forts, ensemble !

Le CAPAS est aussi un catalyseur important qui est capable de mobiliser ses membres pour des actions de plaidoyer. En novembre, pas moins de 26 organisations ont soutenu une interpellation politique plaidant pour qu’une aide extraordinaire soit allouée pour toutes les catégories de travailleuses et travailleurs qui ont perdu leur emploi et qui n’ont pas accès à notre système de protection sociale actuel. Cette interpellation a débouché sur ce nous avons communément appelé la L12, puisqu’au mois de décembre, une très grande majorité du Grand Conseil a décidé de confier 12 millions de francs à des organisations membres du CAPAS pour venir en aide aux victimes de la crise Covid. Ainsi, le plaidoyer a déployé des effets. Le prix de la Vigne des Nations est venu couronner ce travail et honorer pour la première fois un collectif genevois. Au terme de cette année qui nous a amené à faire preuve de beaucoup de créativité, nous pouvons encore une fois saluer l’engagement de celles et ceux qui ont apporté des réponses et des aides aux plus faibles d’entre nous, et remercier le Conseil d’Etat pour la mise en lumière de nos actions.

Cette reconnaissance restera gravée dans nos mémoires et dans les faits.

Alain Bolle, Président du CAPAS