Prise de position CAPAS sur la modification de l’article 50 LEI

Le CAPAS a pris position dans le cadre de la procédure de consultation fédérale « Garantir la pratique pour raisons personnelles majeures visées à l’article 50 LEI en cas de violence domestique », issue de l’initiative parlementaire 21.504. Il salue et approuve cet avant projet de loi. Consulter la prise de position.

L’article 50 de la Loi sur les étrangers et l’intégration (LEI) vise à protéger les personnes étrangères (majoritairement des femmes) victimes de violences conjugales, en permettant de prolonger l’autorisation de séjour des personnes venues par regroupement familial lorsqu’il y a rupture de la vie commune.

Un droit trop limité

Actuellement, le droit prévu par cet article est uniquement accordé aux épouses et époux de Suisses et de titulaires d’un permis C. Ainsi, en cas de séparation, certaines personnes migrantes victimes de violences domestiques risquent d’être expulsées de Suisse si leur permis de séjour dépend de la non-dissolution de leur union. Se trouve ainsi en balance une situation de violence pour elles-mêmes et souvent leurs enfants et leur titre de séjour. Le nouveau texte de loi souhaite ouvrir la protection à toutes les victimes indépendamment du statut de séjour ou de la nationalité de leur conjoint∙e qu’elles et ils soient titulaires d’un permis B, L ou F.

De plus, la mise en œuvre de cette disposition est restrictive, faisant dépendre, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la notion de violence d’une « certaine intensité » et d’un exercice systématique. Cette exigence a pour conséquence de tolérer, de fait, un certain degré de violence domestique.

Critères de preuve à clarifier et autres critères à adapter

Les critères de preuve doivent également être clarifiés : actuellement, les rapports des organisations de protection contre la violence, des psychologues et des travailleurs et travailleuses sociaux spécialisé·e·s dans le domaine de la violence, voire même les attestations médicales relatives aux conséquences de la violence, ne sont pas toujours acceptés par les autorités de migration comme preuve de la violence, ou leur pertinence est mise en doute. Le fait d’avoir bénéficié d’une protection et d’un soutien dans des maisons d’accueil pour femmes et des services de protection contre la violence, ainsi que d’avoir été reconnue comme victime au sens de la Loi sur l’aide aux victimes d’infractions (LAVI), ne suffit pas non plus, dans de nombreux cas, à prouver que le seuil d’ « intensité » requis est atteint.

L’exigence des critères d’intégration permettant de rester en Suisse doit aussi être adapté : les personnes concernées sont souvent isolées socialement en raison de restrictions de liberté. Elles ont donc besoin de suffisamment de temps pour s’approprier une vie sociale. Le projet prévoit que les victimes de violence domestique pourront rester au minimum trois ans en Suisse au lieu d’un an (durée de toute autorisation de séjour) qu’elles remplissent les exigences en matière d’intégration (indépendance financière, compétences linguistiques) ou non.

La notion de concubinage doit également être revue et prise en compte de manière moderne: selon le droit en vigueur, les concubin·e·s n’entrent pas dans le champ d’application de l’art. 50 LEI. Le projet de loi prévoit d’appliquer ces droits à tout type de concubinage (union conjugale, partenariat enregistré ou concubinat). Mentionner explicitement les couples formés par des personnes LGBTQI+ dans le texte serait souhaité.

Enfin, le terme « violence conjugale » est par « violence domestique »: d’une part, il s’agit d’une conséquence de l’adaptation moderne de la notion de concubinage, d’autre part, le terme de « violence domestique » désigne plus justement cette forme de violence qui a souvent lieu dans l’espace privé et sans témoin.

Ces modifications sont dues à un important travail mené par des membres du Groupe de travail femmes migrantes et violences conjugales, dont certaines des associations du CAPAS (CCSI, CSP, Camarada) sont membres actifs. Elles ont œuvré depuis des années avec des parlementaires alliées pour obtenir ces changements. Le CAPAS salue l’investissement dont elles ont fait preuve pour ces avancées primordiales.

Résultats de la consultation

Prendre connaissance du rapport sur les résultats de la procédure de consultation en date du 12.10.2023

Position du Conseil National – 19.12.2023

Le 19 décembre 2023, le Conseil National a adopté, par 129 voix contre 65, le projet de loi qui vise à renforcer la protection des victimes de violences domestiques, en leur donnant droit à la régularisation de leur séjour en cas de séparation.

Le dossier passe maintenant au Conseil des Etats.

Position du Conseil des Etats- 28.02.2024

Le 28 février 2024, le Conseil des Etats a adopté le projet de loi, par 31 voix contre 8.

Le dossier repasse maintenant au National pour éliminer quelques divergences.